Marius et Jules César - Leurs monuments dans la Gaule, par Isidore Gilles ; Marseille, librairie E. Camoin, 1871.
 
 
p.16-18
On a cru reconnaître dans un long boyau voûté, qui est à l'est et en dehors du camp, entre le torrent des Antiquités et l'établissement de Saint-Paul, un aqueduc ou plutôt un égout de Glanum; mais outre que cet ouvrage est en dehors de l'enceinte et à un niveau considérablement inférieur à celui de la ville, il n'est pas difficile de reconnaître à la grosseur des blocs dont les murs sont formés, qu'on est en présence d'un monument romain, dans le genre de celui de C. Publicius (1), ou plutôt d'un ouvrage celtique, ainsi que le prouvent les kelté et les lances en silex, trouvés mélangés avec des objets romains, par un élève en médecine attaché à l'établissement de Saint-Paul.
Le camp de Glanum était alimenté à l'est par les eaux du vallon de Saint-Clergue, qui coulent actuellement dans un aqueduc en maçonnerie ordinaire, bâti pour l'usage du couvent de Saint-Paul-des-Mausoles. Ces eaux arrivaient alors naturellement dans le torrent des Antiquités, d'où elles étaient déviées, pour le service du camp, dans un petit aqueduc en pierre de taille qu'on voit au pied extérieur du mur, et qui pénétrait même dans l'enceinte fortifiée par des ouvrages existant encore.
Il était alimenté à l'ouest par les eaux du vallon des Chaudrons, qui coulaient naturellement dans le lit du torrent ; mais il est facile de reconnaître que Marius se préparait à faire un barrage, pour en surélever le niveau et les faire remonter jusqu'à la partie supérieure du camp.
On voit, en effet, à l'entrée de l'étroite gorge de cette vallée qu'on nomme les Chaudrons, un commencement d'entaille double faite de chaque côté du rocher, destinée à recevoir un barrage en maçonnerie pour emmagasiner et surélever les eaux, ainsi que l'ébauche d'un canal aussi creusé dans le roc dans toute la longueur de la gorge, et jusqu'en face du mas de Vidau.
Ce travail, à peine commencé lorsque Marius quitta le camp de Glanum , fut abandonné en l'état où nous le voyons et n'a jamais été terminé, malgré l'affirmation contraire de quelques écrivains. M. de Lagoy, dans une dissertation imprimée en 1834, pense que cet aqueduc était destiné aux usages de la ville de Glanum : " On aperçoit, dit-il, dans les rochers, les traces de constructions qui prouvent avec évidence que plusieurs des vallons plus élevés avaient été fermés par une double muraille pour retenir les eaux et former de vastes réservoirs à l'usage et à l'agrément des habitants (2). "
M. de Gasparin , dans son Cours complet d'Agriculture (3) , parle aussi de ce barrage comme ayant réellement existé, et d'autres écrivains, convaincus par l'autorité de ce grand nom, sont allés jusqu'à citer le barrage de Saint-Remy comme moyen de se procurer des eaux d'arrosage.
Mais il est facile de reconnaître que le barrage et l'aqueduc n'ont jamais été achevés ; que ses eaux ne pouvaient arriver à Glanum, placé à un niveau beaucoup plus élevé (20 mètres environ) et qu'elles étaient, au contraire, destinées à alimenter la partie supérieure du camp de Marius (4).
Si les habitants de Glanum avaient voulu amener des eaux dans leur ville, ils n'auraient pas choisi celles de la gorge des Chaudrons, mais plutôt celles du vallon de Saint-Clergue, qui ne tarissent jamais, sont plus rapprochées, plus abondantes et à un niveau plus élevé. C'est à Saint-Clergue qu'ils auraient établi leur barrage et construit leur dérivation, et non aux Chaudrons, où l'eau manque une partie de l'année.
Quoi qu'il en soit, la seule vue des lieux prouve que le mur d'enceinte, le petit aqueduc qui est à ses pieds, le réduit, et les travaux du val des Chaudrons sont de la même époque et ne peuvent appartenir qu'au dernier camp de Marius.
 
 
(1) – PIRANESI, t. II, plan., 2, 3, 4 et 5.
(2) – Description de quelques médailles inédites, 1834, p. 23.
(3) – T. 1er, p. 447 et 8, et Statistique, t. II, p. 1143.
(4) – L'abbé Lamy, p. 23, reconnaît que cet aqueduc dirigeait ses eaux du côté des deux monuments.