- Lettres du Comte de Caylus à Esprit Calvet.
- Bibliothèque Calvet, Avignon, Ms. 2366.
- Lettre du 21 Mars 1763 :
- Votre dernière lettre du 11 Mars ........
- .... (f°68) ... L'écluse dans le roc et le plan de cet aqueduc, avec
les proportions, le détail de la bâtisse, ainsi que la direction des
eaux, enfin ce que l'on peut découvrir sur ce monument serait bien un
article pour moi et très intéressant. Il n'exige qu'un homme entendu
dans le bâtiment ...........
- Lettre du 7 Octobre 1763 :
- ...... de répondre à celle que j'ai reçue du 28 Septembre ....
- .... (f°94) ... Votre écluse m'a fait grand plaisir dans votre
lettre et j'en ai vu les détails avec beaucoup de satisfaction sur vos
plans, mais j'ai trouvé dans votre description les impressions de la
nature que le local peut seul inspirer à de certains caractères ;
ainsi je vous aurais renvoyé vos desseins et vos remarques quand-même
je n'aurais pas lu le dernier article de votre lettre, et comme vous
n'avez gardé aucun brouillon vous trouverez dans ce paquet la copie
des endroits qui regardent cette écluse, les restes de la lettre
m'étant nécessaire ; j'ajouterai que je n'ai communiqué cette objet
curieux à personne, et je vous exhorte de toutes mes forces à écrire
sur Glanum non seulement par ce que vous le voyez bien chaudement, et
d'une façon lumineuse, mais à cause que l'Académie n'en a jamais
entendu parler que par une triste et monotone dissertation de votre
Ménard, qui même n'a pas dit un mot de l'étang.
- Ne croyez point que je vous renvoye vos desseins comme un amant
piqué, renvoye les lettres de sa maîtresse. 1° – Je ne connais
point le local, j'en parlerais mal. 2°– Le mémoire sera bien
traité par vous. 3° – Il est convenable de votre part. 4° – Le
détail venant de vous, fera plus d'honneur et de plaisir à
l'Académie. Travaillez donc. Je crois cependant qu'un plan de
l'étang, et dans un coin de cette carte le dévelopement de l'écluse,
seront nécessaires, pour l'intelligence de votre mémoire. Si vous me
les envoyez exactement levés et dessinés, je m'offre de les faire
réduire et graver en ami .........
- Lettre du 12 Mai 1764 :
- ....... (f°l23) ... L'unique attention que vous avez pu avoir était
de croire que cette écluse n'était qu'un simple niveau, mais je suis
persuadé que les antiquités de St Rémy nous donnerons les détails
les plus singuliers qu'aucune partie de l'Empire. Je répond donc très
mal à tout ce que je dois vous écrire, mais je suis malade .........
- Lettre du 28 Mars 1765:
- ..... (f°l45) .... Plus je pense à l'écluse dont vous me parlez et
que vous avez revue et plus je vois qu'on ne peut en parler
convenablement si elle n'est accompagnée de la vue du dessein, enfin
de tout don détail. Je suis occupé sérieusement de St Rémy,
j'attends le plan et l'élévation du théâtre d'Orange que je n'ai
point trouvés dans les desseins de Mignard, et qui cependant est
nécessaire pour le projet dont je suis occupé. Je jugerai en le
voyant du parti que je pourrai tirer des dessinateurs pour St Rémi, et
je vous enverrai avec grand plaisir le dessein de l'Ecluse. Tout ce que
vous direz pour lors sera fondé en raison et ne laissera rien à
désirer .............
- Lettre du 1er Mai 1765 :
- ...... (f°153)... Je suis charmé de ce que vous me mandez de
l'écluse de St Rémy et si vous pouvez l'examiner vous-même et comme
vous me le mandez, ce sera des affaires d'antiquités dont je serai le
plus satisfait.
- Lettres d'Esprit Calvet au Comte de Caylus.
- Bibliothèque Calvet, Avignon, Ms. 2345, Tome II, Oeuvre de Calvet.
- f°329 à 331
- Description, dessin et mesures de l'écluse antique de St Rémy,
adressés à M. le C. de Caylus, qui se proposoit d'en faire usage,
lorsque la mort le prévint.
-
- M................................................................................................
- J'arrive à présent à notre fameuse écluse, j'ay grand plaisir de
pouvoir vous en donner les détails, rien, je crois, ne m'a échappé.
Représentés vous une chaînes de hautes montagnes, inégales pourtant
qui forment un cercle de mille ou quinze cent pas de diamètre. Ces
montagnes s'ouvrent du coté de l'ancien Glanum par une gorge
extrêmement étroite qui s'élargit un peu à mesure qu'on avance vers
l'ancien lac. Les romains sçurent profiter admirablement de ce que
leur offroit la nature pour se procurer les plus grands avantages, je
vous avoue que je ne les ai jamais trouvés plus grands que dans ce
travail. A l'entrée de la gorge des montagnes du coté de l'étang, on
voit de chaque coté. deux embrasures taillées dans le roc, pour
soutenir deux martelières l'une devant l'autre ; contre les deux
embrasures les plus éloignées de l'étang est un reste de bâtisse
antique qui soutenoit la seconde martelière. Cette bâtisse se
distingue à peine du rocher. Les premières embrasures sont un peu en
avant la partie étroite de la gorge, par ce moyen la martelière
étoit encore soutenue par le rocher postérieur.(Ceci vous paroitra
obscur, mais je l'éclaircirai en expliquant les figures) Le long de la
montagne du coté gauche en regardant l'étang est un canal taillé
dans le roc à la hauteur d'environ trois toises ; quand au moyen des
martelières fermées, les eaux de 1 'étang étoient montées à cette
hauteur, elles tombaient nécessairement dans ce canal d'où elles
étoient portées dans la ville. La profondeur du canal dans les
endroits conservés est d'un pied ; sa largeur, est de dix pouces en
haut et six pouces au fond. De distance en distance du coté du canal
et non de 1'autre coté, on voit des trous quarrés taillés dans le
roc de trois pieds de, large, ils sont tous au dessous du canal, ces
trous me paroissent avoir été faits pour soutenir une galerie de bois
qui devoit régner le long du canal afin de pouvoir le nétoyer.
L'embrasure pour les martelières du coté de l'étang a quatre pieds
de large, la seconde embrasure a trois pieds. L'intervalle entre les
deux embrasures du même coté est de quatre pieds six pouces et dans
d'autres endroits de cinq pieds. La gorge se rétrécit à six pas ou
environ de la martelière. Le long de cette gorge coulent encore deux
ou trois petites fontaines. Pour y passer on est obligé de se
cramponer sur le rocher avec de grands risques ; il y en a encore plus
à monter dans le canal, l'amour de 1 'antiquité donne des ailes.
Voilà les ouvrages romains que l'on voit encore de ce coté là, ils
sont prés du tombeau et de l'arc de triomphe. Par le moyen de ces
martelières les romains retenoient les eaux et formoient un vaste
étang dans 1'endroit où sont à présent de mauvaises terres mal
cultivées. Il leur en résultoit trois grands avantages : 1° – Ils
distribuoient à volonté des eaux abondantes dans leur ville,
principalement pour laver. 2° – Ils avoient du poisson en abondance.
3° – Ils se garantissoient des torrens qui tombent de ces montagnes
et qui dévastent aujourd'hui le territoire de St Rémy, il n'en
coûteroit pas deux mille écus pour remettre les choses dans l'ancien
état, je l'ay dit et répété aux chefs du païs, ils n'y veulent
rien entendre.
- Je passe à l'explication des dessins, je les ai faits moy même comme
vous voyés, ils sont mauvais mais exacts.
- Pl. 1.
- J'ay été obligé de supposer hors de la planche la partie
postérieure de l'ancien étang à cause de son étendue ; je n'ay pas
pu vous donner une échelle, parceque la gorge BB est si étroite
qu'elle auroit été un cheveu dans le plan. Excepté dans le fort de
l'été, il y a toujours de l'eau dans la gorge, elle vient des
fontaines qui sont dans le lieu même.
- Pl.2.
- Les trous C ou B sont le plus souvent à une distance inégale soit
entre eux soit par rapport au canal. La distance AB est de beaucoup
trop petite dans le dessin.
- Pl.3.
- Les embrasures AA et BB ne sont pas dans l'endroit le plus étroit ;
de cette sorte le poids énorme des eaux étoit soutenu par les
montagnes ED et EF. On voit en DD la bâtisse antique. Je me
persuaderois volontiers que l'intervalle CB entre les deux martelières
étoit rempli de terre batue.
- Pl. 4.
- C'est la vue de l'ancien étang en sortant de la gorge, le jour est
assès sombre dans cette gorge ; quand on en sort, on apperçoit
brusquement la grande montagne B. L'après midi lorsqu'elle est
éclairée par le soleil couchant, c'est une espèce de coup de
thèatre, je n'ay pas vu de spectacle plus frappant ni de plus
majestueux.
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- Notes
- Le manuscrit du Musée Calvet ne comporte que 2 planches non
numérotées. Elles portent les commentaires suivants :
- Pl. 3 – coupe horizontale
des embrasures taillées dans le roc. Les embrasures suivent le sens de
la pente de la montagne, de sorte que les distances entre A et A et
entre B et B est beaucoup plus grande en haut qu'en bas. la profondeur
des embrasures est environ d'un pied, elle est moindre en haut. Leur
hauteur à vue d'oeil peut être de 18 à 20 pieds.